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Linwood Boomer : « Cette série, c’est un peu mon histoire »

Le créateur de la série Linwood Boomer évoque la génèse, les débuts, et l'avenir de Malcolm dans un entretien à The Hollywood Reporter.

Linwood Boomer, le créateur de © DR
Linwood Boomer, le créateur de "Malcolm".

C’est comme acteur que Linwood Boomer fait sa première apparition dans le monde de la télévision. Il tient le rôle d’Adam Kendall dans La petite maison dans la prairie au cours des années 70 et 80. S’en suivent quelques rôles à la télévision, avant qu’il ne se dirige vers l’écriture, et la production de séries télé. Il est entre autres le producteur de 3ème planète après le soleil et de la série animée Dieu, le Diable et Bob. En 1999, il entame la production d’une série familiale, qui deviendra Malcolm in the Middle. Des débuts délicats, beaucoup d’appréhension, mais au final, un immense succès. À l’aube de la diffusion du 100ème épisode (interview réalisée pour le Hollywood Reporter le 18 février), Linwood Boomer parle des débuts de la série et de son avenir.

Hollywood Reporter : Racontez-nous la genèse de la série.
Linwood Boomer : Au début c’était juste un exercice de style, j’avais envie de participer à la production d’une sitcom filmée en single camera [La plupart des sitcoms sont filmées en public et par plusieurs caméras, à la manière d’une pièce de théatre, NDLR] et je voulais convaincre un producteur de m’engager dans son personnel. Mais mon agent m’a convaincu de tenter d’en faire une véritable série télé. Immédiatement, nous avons été contacté par des chaînes de télé, c’était assez surprenant car Dawson venait d’apparaître sur la Warner alors on aurait pris moins de risques en créant une nouvelle série sur une bande d’adolescents.
Au départ, qui était le plus intéressé ?
UPN. Ensuite, nous avons rencontré Regency Télévision. Gail Berman (co-fondateur de Regency TV, désormais président de Fox Entertainment) et Tracy Katsky (alors membre de la cellule « comédie » de Regency, depuis épouse de Linwood Boomer) ont adoré le script du pilote. Dès cet instant, ils se sont impliqués à 100% pour que le pilote soit tourné.
Si on tient compte des ambitions et du fait que la série devait se tourner en single camera, c’était une décision courageuse de leur part.
Tout à fait. Mais je ne voulais pas à tout prix faire quelque chose de différent pour me démarquer du reste, j’avais simplement envie de raconter une histoire en partie inspirée de mon enfance et je voulais le faire d’une certaine façon, avec les contraintes matérielles que ça implique. L’histoire devait être racontée du point de vue d’un enfant intellectuellement précoce, avec parfois des moments difficiles sans que ce ne soit déprimant, l’idée était quand même de faire une série humoristique.
Après que UPN se soit montrée intéressée, que s’est-il passé ?
C’est resté en suspens pendant un mois ou deux mais il était évident que ce n’était pas le genre de programmes qu’ils recherchaient, surtout les gens haut placés. Nous n’étions pas ce qu’il leur fallait, ça n’aurait pas marché.
Et puis la Fox est arrivée.
Dieu merci. Doug Herzog, qui venait alors d’arriver au poste de président de Fox Entertainment, a été enthousiasmé dès le début. Il nous a dit « OK, on le tourne », rien que ça ! On nous a commandé 13 épisodes et la diffusion a été annoncée pour la mi-saison.
Pourtant, les réactions du panel de téléspectateurs sélectionné pour participer à la séance de projection privée ne laissaient pas prévoir un succès à long terme.
Oh oui. On nous a dit « La mère est méchante ! », « Tout le monde va détester la mère ! », « Et personne ne va aimer le gamin non plus ». Selon eux, il aurait fallu des scènes où l’on verrait les parents aider Malcolm, et Malcolm remercier ses parents pour leur aide.
Manifestement, on ne comprenait pas ce que vous tentiez de faire.
Tester quelque chose de nouveau, c’est un peu aléatoire. Ça ne se justifie pas, ni scientifiquement ni du point de vue commercial. C’est quelque chose que les gens font, mais vous savez, il y a d’autres choses dans le monde qui n’ont pas de sens mais qu’on fait quand même !

« Hal est tellement hilarant, il a changé presque toute la dynamique de la série à lui tout seul. »

Linwood Boomer à The Hollywood Reporter
Mais heureusement, la Fox ne les a pas écoutés.
Voilà. Et nous avons débarqué en janvier 2000 avec une promotion quotidienne énorme. Je crois que je suis le seul producteur dans l’histoire de la télévision à ne pas supporter de voir la promotion pour son propre programme !
Donc, vous débarquez et c’est un carton. Cette série est largement inspirée de votre enfance, puisque vous vous disputiez avec vos frères et vos parents et vous avez été placé dans la section surdoués à 9 ans.
Oui. Au départ, Malcolm devait être un garçon de 9 ans joué par un garçon de 12 ans qui en faisait 9. Mais au bout d’un an, nous avions un acteur de 13 ans qui en faisait bien 13. On a dû adapter les scénarios avec des histoires mettant en scène des adolescents, pas des enfants. Ç’aurait été un peu grotesque d’avoir un garçon de 16-17 ans qui parle de skateboard mais pas de filles. Durant la saison 2, on pouvait encore se le permettre de temps en temps mais ensuite Frankie et Justin ont mué alors on ne pouvait plus décemment les faire passer pour des enfants.
Quelle chance que vous ayez un si talentueux casting !
C’est vrai. Par exemple, au départ la série devait être basée sur Malcolm et sa mère mais au fil des journées de tournage nous avons découvert à quel point Bryan (Cranston) était drôle alors nous avons beaucoup fait évoluer le personnage de Hal. Il est tellement hilarant, il a changé presque toute la dynamique de la série à lui tout seul.

« ‘Malcolm’, c’est un peu mon histoire, dans une version très exagérée de la vérité. »

Linwood Boomer à The Hollywood Reporter
Est-ce que Malcolm est vraiment autobiographique ?
Et bien, vous savez, cette histoire qu’on vous raconte tous les ans à Thanksgiving ? Une fois qu’on vous l’a répétée 14-15 fois, vous la modifiez par vous-même pour en faire votre histoire. Cette série, c’est un peu mon histoire, dans une version très exagérée de la vérité.
Comme beaucoup de ce qu’on voit à la télévision aujourd’hui.
Exactement.
Alors, quel avenir pour Malcolm à présent ?
Très honnêtement, je ne sais pas encore. On a passé beaucoup de temps pour s’assurer que les épisodes avec le bébé soient drôles, beaucoup de temps à parler du bébé, de ce qu’il apporterait à la série. Nous ne voulions pas que ça devienne crétin, et je ne pense pas que ce soit le cas.
Propos recueillis par Ray Richmond, le mercredi 18 février 2004, pour The Hollywood Reporter.

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