Interviews
Bryan Cranston : « Je n’ai aucun regret »
Bryan Cranston fait part de ses impressions quant à sa participation à Breaking Bad, et revient sur Malcolm et l'ensemble de sa carrière dans ce long entretien passionnant.


- LA CityZine : Aviez-vous la volonté de chercher un rôle dramatique après votre personnage de Hal dans Malcolm ?
- Bryan Cranston : Je cherchais quelque chose de comique qui soit différent ou dramatique, oui. On m’a proposé des rôles similaires à Hal et je les ai refusés. Ç’aurait signé la fin de ma carrière. Je voulais faire d’autres choses, mais honnêtement, je n’aurais pas pu rêver d’une autre série si bien écrite et d’un personnage aussi bien défini que Hal dans Malcolm.
- Pouvez-vous nous parler un peu de votre nouvelle série, Breaking Bad ?
- C’est une histoire compliquée à propos d’un homme simple. C’est un professeur de chimie au lycée qui a la cinquantaine. Il vit sans le dire une vie triste et remplie de regrets, et il n’a pas pu concrétiser les projets qu’il avait en tête dans sa jeunesse, ce qui le confronte à une crise de la cinquantaine. Pour couronner le tout, il apprend qu’il est atteint d’un cancer des poumons en phase terminale et qu’il n’a plus que deux ans à vivre. Donc il passe une sale journée. Au début, il est hébété par ce qu’il vient d’apprendre, et il ne sait pas quoi faire. Puis, il réalise qu’il est sur le point de traverser cette transformation de son corps, cette détérioration, et qu’en fin de compte il va mourir. Sa femme va s’inquiéter pour lui, sans parler du fait qu’il va laisser sa famille sans un sou. Ce n’est pas comme s’il avait de l’argent. Un professeur de lycée dans la banlieue d’Albuquerque au Nouveau-Mexique ne gagne pas beaucoup d’argent. Alors, dans ce contexte désespéré, il décide d’agir de façon désespérée, c’est-à-dire d’utiliser son laboratoire de chimie pour réunir le plus d’argent possible avant de mourir, en préparant des amphétamines et en devenant un dealer de drogues.
Quand on entend la version courte de l’histoire, un professeur de chimie au lycée qui devient un dealer de drogues, on se dit : je ne sais pas si j’ai envie de regarder ça. Pourquoi un scientifique voudrait faire ça ? Et quand on regarde la série, on voit que la fin justifie les moyens. Je ne pense pas que quiconque, même moi, peut objectivement dire qu’il fait quelque chose de bien. Bien sûr que non. C’est un homme bon qui prend de mauvaises décisions.
« Je suis convaincu que le regret est un des pires sentiments qu’on puisse vivre, si on exclut la maladie physique. »
- Comment avez-vous été impliqué dans Breaking Bad ?
- Par le biais du parcours habituel. Je reçois constamment des scripts par mon agence avec une petite et brève description des projets. Ensuite, il faut se mettre à la lecture. Chaque acteur lit des tonnes et des tonnes de scripts. On m’a dit que le créateur de Breaking Bad, Vince Gilligan, souhaitait me voir, et on m’a rappelé qu’il me connaissait d’il y a 10 ans quand j’ai tourné dans un épisode de X-Files qu’il avait écrit. Je me rappelais vaguement de qui il était, mais nous n’étions pas restés en contact. C’est toujours bien quand quelqu’un demande à vous rencontrer.
Donc j’ai lu le script et je l’ai trouvé brillant. J’ai appelé mon agence sur-le-champ et j’ai dit : « Oui, organisez un rendez-vous dès que possible. » J’ai alors attendu trois jours et j’ai commencé à méditer sur le script, les prémisses du personnage qui commençait à s’infiltrer en moi et dans ma tête. Je rêvassais de cet homme et j’ai même fait un rêve sur lui. J’ai commencé à penser à la posture qu’il pouvait avoir, comment il parlait, comment il marchait, comment il était grave et comment il s’habillait. Tout a commencé à me venir de soi-même. C’est tellement bien écrit que ça s’est diffusé en moi.
On a eu un rendez-vous qui devait durer 20 minutes mais qui a finalement duré une heure et demie. On n’arrêtait pas de discuter. Il disait quelque chose, j’acquiesçais et je rajoutais autre chose, et alors il répondait : « Oui, et ça aussi ça arriverait. » Et ci, et ça. Après ce rendez-vous, il était mon champion et il s’est battu pour que je décroche ce rôle, ce qui a finalement payé.
- Comment vous préparez-vous pour un tel rôle ?
- Comme je disais, quand les scripts sont très bien écrits, votre travail est mâché tellement ils sont descriptifs. Vous avez les gestes à faire, la description visuelle du personnage et des séquences. C’est tellement bien détaillé que ça prend le relais et vous commencez à vous glisser dans la peau du personnage, ou peut-être que c’est le personnage qui se glisse dans votre peau. Vous êtes imprégné de cette personne, que vous parvenez à connaître. Ça ne signifie pas qu’on ne travaille pas selon des choses bien spécifiques, mais c’est l’expérience que vous vivez.
Mais cet homme me parlait. Je connais des gens comme lui. Je suis convaincu que le regret est un des pires sentiments qu’on puisse vivre, si on exclut la maladie physique. Ça reste en vous et ça se manifeste de deux façons. La première, c’est d’être en colère, cynique et amer, et dire des choses comme : « J’aurais pu faire ça, il n’est pas si bien que ça, elle est laide. » Les gens deviennent amers, coléreux et malveillants. L’autre manifestation est celle que vit Walt : les gens implosent, deviennent invisibles et se fondent dans le décor. Leur voix s’éteint. Tout autour d’eux devient insignifiant. Leur vie, leur personne. C’était le cas de Walt, qui commençait à s’effondrer.
Une autre chose que Breaking Bad m’a appris est que les gens qu’on perçoit comme calmes, faibles ou introvertis, tous ces gens-là, tout comme Walt White, ont un déclic en eux qui peut arriver n’importe quand. C’est ce qui arrive à Walt, dont le volcan d’émotions explose sans qu’il n’y ait de retour possible. Il ressent maintenant des sentiments qu’il n’a pas ressenti depuis 25 ans. Donc non seulement il atteint un point de non retour au niveau émotionnel, mais aussi aux niveaux social et criminel. Il a franchi la limite et il parcourt un voyage dont il n’est pas sûr du dénouement. La seule chose qu’il accepte, c’est qu’il se terminera d’ici un an ou deux.
- Dans quelle mesure prenez-vous des libertés par rapport au script et à quel point est-il suivi ? Laissez-vous place à l’improvisation sur le plateau ?
- La plupart du temps, quand on lit un script tellement bien écrit, on n’a pas envie d’y toucher ! [rires]. Il y a des points qui posent problèmes, ce qui est naturel, mais je lis le script en avance et j’en discute avec Vince. Il accepte qu’on fasse des changements, ou alors il refuse et on arrive à trouver un compromis. S’il est sûr de lui, on tourne la scène de plusieurs façons, de la sienne et de la mienne. On n’a pas le temps de prendre des décisions pendant la production, mais on peut les prendre en post-production.
- Pensez-vous que c’est votre expérience qui vous a appris à travailler comme cela ? Si vous étiez un acteur de 20 ans, seriez-vous aussi diplomate quant à trouver une solution ?
- Non. Quand j’ai débuté, j’acquiesçais tout le temps, comme la plupart des jeunes acteurs. Quand on vient de commencer et qu’on heureux d’être là, on veut plaire et ne surtout pas faire de vagues, on veut acquérir une bonne réputation. Donc même si on doit faire quelque chose sur lequel on est pas d’accord, on se dit : « Oh, je dois interpréter ça bien quand même. Comment faire ça bien ? » Et on le fait. Ensuite, quand on commence à tourner, on réalise : « Je savais que ça n’allait pas quand je l’ai lu. Je savais que ça n’allait pas quand je l’ai tourné. Et maintenant je regarde le résultat et ça confirme que ça n’allait pas. » Alors on est en colère contre soi-même pour ne pas être intervenu et avoir dit quelque chose, de ne pas avoir essayé une approche différente. Vous savez, les meilleurs réalisateurs, scénaristes et producteurs sont assez sûrs d’eux pour être capable d’écouter les divergences d’opinion et de peser le pour et le contre. Ça permet également de renforcer la relation dans laquelle tout le monde est investi dans l’optique du meilleur résultat pour le projet.
- Avez-vous déjà eu des regrets concernant les décisions que vous avez prises dans votre carrière ?
- Je suis très chanceux d’avoir pu vivre très confortablement grâce à mon métier d’acteur. C’est vraiment spectaculaire, donc je n’ai aucun regret.
- Est-ce que vous pouvez faire des parallèles entre vous et Walt ? Y a-t-il des éléments qui vous ont fait reconsidérer des choses dans votre propre vie, ou vous ont fait vous sentir reconnaissant pour ce que vous avez ?
- J’ai réalisé : « Bon sang, on a le même âge. » Ça pourrait m’arriver n’importe quand, mais je n’ai jamais vécu de cette façon. Je porte très peu, vraiment très peu d’attention à mes années passées – principalement de bons souvenirs, des amis et des expériences – et je suis très peu conscient du futur. Vous savez, il faut vivre dans le présent.
- Détendons un peu l’atmosphère. Vous avez beaucoup d’expérience dans la comédie. Pensez-vous que ça vous a permis d’approcher l’humour noir de Breaking Bad différemment d’un acteur qui n’a pas eu la même expérience que vous en matière de comédie ?
- Je suppose, oui. Je pense que le plus important est d’être capable de reconnaître les occasions comiques dans un script et ensuite les jouer à différents niveaux. La comédie, comme vous le savez, est très casse-gueule, donc il faut laisser une certaine marge. Quand on fait une scène comique, on peut soit y aller à fond, dans un comique tarte à la crème, ou alors au contraire on peut y aller très subtilement, dans un comique que certaines personnes ne comprendront pas. Breaking Bad est bien plus dans ce genre-là, et certaines personnes accrochent vraiment à l’humour noir de la série, et d’autres pas. Ce qui est bien, c’est que ça marche quand même. Il n’y a pas besoin de comprendre l’humour, mais je pense que c’est une expérience plus enrichissante si vous le comprenez. Et c’est vraiment très sympa à jouer. Malcolm dégageait beaucoup d’énergie et était parfois bébête. C’était une comédie très démonstrative, alors que Breaking Bad est plus dirigée vers les personnages et le comique circonstanciel. C’est donc différent, mais tout aussi sympa.
- Considérez-vous que jouer dans un registre comique est un processus mécanique ou plutôt une affaire d’instinct ?
- Les deux, je pense. On pourrait dire que le comique vient beaucoup de l’inattendu, non ? Par exemple, le type sort la flèche de son carquois et il la met dans son arc, et vous voyez la cible et vous vous attendez à ce qu’il touche la cible et il touche la vache à côté de la cible. Voilà la surprise. Quand vous avez un élément de surprise, vous avez de la comédie. Mais on ne peut pas apprendre la comédie en la résumant à ça. L’enseignement doit se faire naturellement puis être prolongé. On peut faire ça, cependant. Si quelqu’un a un sens basique de la comédie sans savoir un vrai sens de l’humour, alors on peut faire ressortir et aiguiser ce sens de l’humour.
- Il est intéressant de noter un point commun entre Walt White et Hal : ils portent tous les deux des slips kangourou. C’était délibéré ?
- Non. Mais peut-être que oui, en y réfléchissant. Ça s’est imposé à moi pour Breaking Bad. Dans Malcolm, quand je suis allé à mon rendez-vous pour la garde-robe, il y a huit ou neuf ans, j’ai vu plein de types de sous-vêtements. J’ai vu les vêtements pour les garçons, et ils avaient des slips kangourou, ce qui était normal. Réalisant que mon personnage était un grand garçon, j’ai dit que je devrais les porter moi aussi. La première chose qu’a fait Heidi Kazynski, notre responsable des costumes, a été de rire. J’ai dit que c’était ce qu’il fallait parce qu’il était un garçon.
Revenons à Breaking Bad. Dans le script, il y avait cet homme qui conduisait une caravane avec un masque à gaz et sans vêtements sauf un slip kangourou. Au début, je n’ai pas percuté parce que j’y pensais objectivement. Quand j’ai réalisé que j’allais le jouer, j’ai dit à Vince que mon personnage dans Malcolm portait des slips kangourou tout le temps. Il a dit : « Oh, oui, j’avais oublié. On changera ça. Vas-y, choisis les sous-vêtements que tu veux. » Je suis allé voir Kathleen del Toro, notre responsable des costumes sur Breaking Bad, et elle avait tout types de choses : boxers, caleçons, slips. Je les ai regardé… et quelque chose n’allait pas. J’ai jeté un oeil aux slips kangourou et j’ai pensé : « Qu’est-ce que ça serait triste qu’un homme adulte porte ça. » Et j’ai réalisé que c’était parfait pour Walt.
Pour des raisons très différentes, j’ai choisi de garder le slip kangourou parce qu’il indiquait la paralysie de son évolution en tant qu’être humain, en tant qu’homme. Et ça donnait de la peine de voir ce pauvre gars qui porte toujours des slips kangourou. Il n’a pas évolué dans ses choix vestimentaires ou dans son statut émotionnel, et ça m’a aidé que ça se manifeste aussi visuellement.
- Vous avez réalisé des épisodes de comédie avec Malcolm. Est-ce que ça vous dirait de réaliser des épisodes de Breaking Bad ou quelque chose qui s’en approche ?
- J’aimerais. Je ne sais pas si je réaliserai un épisode cette saison. Ça dépend d’un tas de choses, mais si on a le droit à une troisième saison, je réaliserai à coup sûr un épisode ou deux. J’apprécie les différences bien distinctes entre jouer et réaliser, et je réalise à quel point il est dur d’être réalisateur et à quel point, en tant qu’acteur, on se sent égocentrique. Même dans les cours de comédie, on nous apprend : « Qui est votre personnage ? Qu’est-ce qu’il veut ? Qui est dans votre chemin ? Que vient-il de vous arriver ? » Tout tourne autour de vous. Et c’est vraiment comme ça qu’il faut approcher un personnage : moi, moi, moi. Certains acteurs transposent ce « moi, moi, moi » dans leur vraie vie, ce qui leur attire des ennuis et leur donne une réputation négative.
- Quelles sont les vraies différences entre être un réalisateur et être un acteur ?
- Un réalisateur doit faire attention à tout le monde. Chaque département a une multitude de questions qui doivent être répondues, et vous êtes la personne qui doit y répondre. Parfois, on se dit : « Oh, c’est une question bête. Pourquoi je devrais prendre la peine d’y répondre ? » Je me souviens avoir fait un film indépendant appelé Last Chance, il doit y avoir neuf ans, et je me suis éclaté à le faire. C’était un drame doux et romantique, une histoire très linéaire sur une femme qui pense ne plus avoir de choix ou d’espoir dans sa vie et comment elle retrouve cela.
Je me souviens que le chef accessoiriste est venu me voir alors que j’étais en train de réaliser, et il m’a demandé : « Quel genre de tasse à café vous voulez dans la scène ? » J’étais occupé à faire d’autres choses qui étaient selon moi bien plus importantes. On s’en fiche. Des tasses à café. N’importe lesquelles. Il suffit d’en choisir et de les mettre sur la table. Je l’ai un peu envoyé paître et il a dit : « D’accord. » Il est parti, et le jour suivant où l’on tournait cette scène, les tasses à café avaient des petits pois dessus.
- Donc elles ne convenaient pas du tout pour la scène ?
- Pas du tout, c’était trop gai. En plus, quand un acteur soulève une tasse à petits pois, notre attention est attirée par la tasse. On a le regard sur la tasse, et je me suis dit : « Voilà ma leçon. » Chaque décision est importante et je n’en voulais pas au gars. Il faisait son boulot, j’étais impatient et j’ai appris une bonne leçon. J’ai dit : « Je suis désolé. Est-ce qu’on a d’autres tasses ? » Et on a eu des tasses en marron uni.
- Vous ne semblez pas avoir de difficultés à trouver du travail. Quel conseil avez-vous à donner aux acteurs en devenir, si on prend le talent comme pré-requis ?
- Oui. C’est toujours bien. Je pense que le plus important pour un acteur, c’est de travailler en tant que tel. Faites-le dès que vous le pouvez, que ça soit n’importe où sur scène ou dans des Student Films, travaillez comme acteur autant que possible. Chaque fois que vous le ferez, vous apprenez quelque chose. Vous apprenez une chose ou deux, ou vous ferez une expérience, ou vous rencontrerez quelqu’un qui pourrait s’avérer important pour votre carrière plus tard. C’est possible.
Quant à commencer à auditionner professionnellement, j’ai un conseil très spécifique pour les acteurs qui est le suivant : n’allez pas chercher un boulot. Si vous allez passer une audition en espérant que vous décrochez ce boulot, vous vous condamnez à l’échec, parce que ce n’est pas ce que vous faîtes. Vous devez changer de perspective et réaliser ce que vous faites. Votre boulot, ce n’est pas de décrocher le boulot, votre boulot, c’est de vous concentrer sur le personnage et servir la pièce ou le scénario et en faire la meilleure interprétation ou la plus intéressante version du personnage. Peut-être la version la plus surprenante que vous pouvez faire, la plus prenante. Quelque chose qui fasse que les gens dans la pièce lèvent la tête et vous regardent. Votre boulot, alors, est simplement de présenter ce personnage dans le contexte de cette audition, et puis de partir.
Et lorsque vous êtes dans l’ascenseur en train de partir ou dans votre voiture en train de rentrer chez vous, que vous repassez l’audition dans votre tête comme tous les acteurs, alors demandez-vous : « Est-ce que j’ai fait ce que je voulais ? Est-ce que j’ai fait de mon mieux ? Est-ce que j’ai touché les points sensibles que je voulais ? Est-ce que j’étais énergique quand je le voulais ? Est-ce que j’étais timide quand je le voulais ? » Et si vous pouvez répondre « oui », alors vous devez fêter ça. Vous avez fait du bon boulot. Vous avez fait votre boulot, et vous pouvez oublier. Et rentrer chez vous. Et n’appelez pas votre agent, surtout pas. « Est-ce que tu peux me donner leurs impressions ? Est-ce que tu peux me dire… ? » Surtout pas. S’ils veulent que vous continuez avec eux, ils vous contacteront. C’était une manière de survivre pour moi, de ne pas voir chaque audition de la façon « décroche le boulot ou échoue ».
- Quel a été votre première expérience d’acteur ?
- À sept ans, j’ai fait une pub pour United Way que mon père a produite et réalisée. J’étais le gamin qui joue au base-ball, et la balle arrive dans la rue, je cours la chercher et je me fais percuter par une voiture.
- Est-ce que vous vous êtes attaché à cette expérience ? Le plateau, les éclairages, le tout ?
- Je savais à cette époque-là que je m’attachais à toute l’attention que l’on me portait, d’une façon immature. Je me disais : « Waouh. Regardez-moi toutes ces personnes qui attendent, qui sont sorties de chez elles pour nous regarder faire ça. » C’était un moyen d’attirer l’attention, ce que tout le monde apprécie. Et puis j’ai grandi, et ça s’est transformé en un pouvoir d’influence sur les émotions des gens, que ce soit en les faisant rire ou en les mettant en colère, ou en les faisant pleurer. Enfin, c’est incroyablement puissant, et je crois que tout le monde sur terre cherche ça. Tout le monde cherche son propre pouvoir, et certains le trouvent dans leur travail, d’autres le trouvent dans leurs enfants. Certains le trouvent dans le bénévolat, d’autres le trouvent dans la production des plus belles roses du quartier, et c’est fantastique. Donc les gens cherchent constamment ce qui leur donne du pouvoir, et c’est ce que je veux dire par là.
- Pouvez-vous nous dire un mot à propos du National Center for Missing and Exploited Children, une association que vous soutenez ?
- Oui. Le National Center for Missing and Exploited Children est ma principale association caritative, celle à laquelle je dévoue beaucoup de mon temps et de mon attention. Je présente leurs remises de prix à Washington une fois par an, ainsi qu’un brunch du congrès. Ça honore le personnel de police et les membres du gouvernement et même les gens lambdas qui ont aidé à sauver des vies d’enfants lors d’événements extraordinaires. Il y a un moment, j’ai fait un DVD appelé Kid Smarts, qui est un programme d’une demi heure proposé en anglais et en espagnol. C’est pour les familles. Vous vous asseyez avec votre famille, vos enfants de six ans et plus. Vous apprenez les règles de bases pour se préserver des kidnapping et des prédateurs sur internet.
C’est un programme super pour les familles afin de pouvoir ouvrir le dialogue autour de la sécurité de leurs enfants et c’est une oeuvre caritative pour le National Center, donc elles peuvent l’acheter sur Amazon. Tous les profits vont au National Center, donc c’est un bon moyen de les soutenir et également d’aider à sensibiliser votre famille. Ça permet aux familles d’être sensibilisées et ça leur confie des informations plutôt que d’être victimisés par l’ignorance, et c’est réalisé sans aucune arme ou violence, et j’en suis très fier.
- Acheter ce DVD est le meilleur moyen de soutenir l’association ?
- Oui. Ça s’appelle KidSmartz et c’est fantastique. Vous pouvez aussi aller sur netsmarts.com ou missingkids.com et visiter le site du National Center, si vous êtes intéressés pour trouver davantage d’informations sur comment protéger vos enfants.
- Vous vous êtes associé avec Fright Site sur Netstudio TV. Pouvez-vous nous en dire deux mots ?
- Bien sûr. C’est un nouveau truc très cool qui s’est fait, et j’ai accepté d’y participer. En gros, c’est pour aider les jeunes scénaristes à démarrer dans le milieu, et nous sommes arrivés à Fright Site. On va produire ce court-métrage, entre thriller et horreur. C’est déjà en cours, donc vous pouvez aller sur Netstudio.tv puis dans la section Fright Site et découvrir la compétition. Pour résumer, nous avons différentes catégories en développement pour ce scénario. Vous pouvez donc proposer une idée de sujet et nous choisirons le gagnant de l’idée originale, et puis ensuite nous passerons à l’intrigue. Quelle est l’intrigue ? Trouvée, alors qui sont les personnages ? Qui est l’antagoniste ? Nous faisons tout ça jusqu’à ce que nous ayons toutes les informations. Nous le rassemblerons ensuite tout ça en un court-métrage et nous le tournerons pour ensuite le présenter à tous les donateurs, alors que le gagnant gagnera un prix et de l’argent. [NDLR : Voir l’article du 15 novembre 2007 sur Malcolm France qui traite de ce projet.]
- Où ce projet en est-il ? Quand pourrons-nous voir le résultat final ?
- Encore deux mois avant que nous finissions le concours, ensuite nous réunirons tous les écrits pour écrire le script final. Ensuite, nous chercherons des acteurs, évidemment, et puis nous le tournerons, avant de le présenter sur Netstudio.tv et tôt ou tard sur YouTube et ailleurs.
- Passons à un rapide questions/réponses. Décrivez-vous.
- Une personne curieuse, simple et complexe.
- Que feriez-vous si on mettait de côté le métier d’acteur ?
- Je pense que je travaillerais en plein air. Si je n’étais pas acteur, je voudrais sûrement faire du management sportif. J’adore le base-ball, donc je ferais probablement quelque chose comme ça.
- Quel est le meilleur conseil qu’on ne vous ait jamais donné, et l’avez-vous suivi ?
- Le meilleur conseil ? Porter des chaussures confortables quand vous êtes à la réalisation. Ce que j’ai fait.
- C’était un bon conseil ?
- Oui. Brillant, parce qu’à la fin de 16 heures sur vos pieds vous êtes seulement épuisés, et pas abattu.
- Quel conseil donneriez-vous au Bryan Cranston de 20 ans ?
- Ne t’inquiète pas. Tu vas vivre une vie géniale.
- Moment le plus mémorable sur un plateau de tournage, si on exclut la tasse à petits pois ?
- Le moment le plus mémorable sur un plateau ? Dans Breaking Bad, je crois que c’était l’épisode 6, je sors de la douche après avoir réalisé que des boules de cheveux tombent de ma tête à cause de la chimiothérapie, et ils tourbillonnent dans le drain. Déprimé, devant prendre tous ces cachets, je décide de raser le reste de ma tête et je deviens chauve pour la première fois. J’ai donc juste pris le rasoir devant la caméra et tout rasé.
- Qu’est-ce qui vous agace ?
- Le gaspillage et les détritus.
- À quoi excellez-vous ?
- À quoi j’excelle ? Je peux charger un lave-vaisselle mieux que quiconque.
- À quoi êtes-vous mauvais ?
- À être patient. Je ne le suis pas du tout, j’ai besoin de plus de patience.
- Qu’est-ce qui vous embarrasse ?
- Ce qui m’embarrasse ? Pas grand chose. Quand vous vous êtes montré nu en slip kangourou devant une équipe de 65 hommes et femmes, pas grand chose ne vous embarrasse.
- Évidemment, les slips kangourou ne vous embarrassent pas.
- Rien ne m’embarrasse.
- Trois grands films.
- Le Parrain, Lawrence d’Arabie et Little Miss Sunshine.
- Trois grands acteurs ou actrices, morts ou vivants.
- Spencer Tracy, qui d’autre ? Meryl Streep et George Sanders.
- Qu’est-ce qui vous plaît à Los Angeles ?
- C’est familier. Et il fait beau.
- Ce que vous n’aimez pas à Los Angeles ?
- La surpopulation.
- La meilleure nourriture à Los Angeles ?
- Un restaurant méditerranéen appelé Carnival, à Sherman Oaks.
- Quelle est la meilleure chose à Los Angeles dont personne n’est au courant ?
- Probablement les randonnées qu’on peut faire près des réservoirs à Los Angeles.
- Enfin, dites-nous quelque chose qu’on ne sait probablement pas à votre propos.
- J’ai été ordonné prête et j’ai uni une douzaine de couples. [NDLR : Notre article du 31 octobre 2005 prouve que les lecteurs de Malcolm France sont au courant !]
- Comment avez-vous été ordonné ?
- C’est un petit truc tout bête. C’est par le biais de l’Universal Life Church, une église qui ordonne sur Internet.
- Une religion sur Internet ?
- Oui. Je l’ai fait quand je venais de finir le lycée et j’avais un ami qui était prête, le Révérend Bob. Il avait accidentellement planifié deux mariages au même moment et ne pouvait pas se trouver à deux endroits différents, donc en urgence il m’a attrapé et m’a dit : « Tu veux te faire 100 dollars en célébrant un mariage ? » J’ai dit : « D’accord. » Donc il a mis la feuille et le certificat dans une machine à écrire IBM Selectric, c’est dire que ça remonte à longtemps, et il a tapé mon nom et l’a envoyé à l’État pour le rendre officiel. Il m’a ensuite donné les références, l’adresse, et un livre pour la lecture. Je me suis dit : « Eh bien, ça me fera de l’argent ! » Tout cela a pris environ 10 minutes, et ça a été un moyen de me faire 100 ou 125 dollars, quelque chose comme ça. Dans les années 70, c’était génial.
- Merci beaucoup pour votre temps !
- Merci à vous !
Propos recueillis le vendredi 2 mai 2008 pour LA CityZine.Sur le même sujet
Mots clés : Breaking Bad, Bryan Cranston, Interview, Malcolm
« Je suis très chanceux d’avoir pu vivre très confortablement grâce à mon métier d’acteur. »
« J’ai un conseil très spécifique pour les acteurs qui est le suivant : n’allez pas chercher un boulot. […] Votre boulot, c’est de vous concentrer sur le personnage et servir la pièce ou le scénario et en faire la meilleure interprétation ou la plus intéressante version du personnage. »
« Quand vous vous êtes montré nu en slip kangourou devant une équipe de 65 hommes et femmes, pas grand chose ne vous embarrasse. »
Commentaires