Dossiers
La continuité
Enchaînant les intrigues les plus originales et les gags les plus savoureux, Malcolm aura su – sans bémol ou presque – nous faire rire pendant sept longues années. De quoi se familiariser avec cette famille américaine délirante, de quoi voir évoluer, grandir, vieillir les personnages ! Et surtout de quoi faire une série dont les épisodes, même si d'apparence isolés, peuvent se révéler liés par certains de leurs aspects. Retour donc sur une facette très peu analysée de la série : sa continuité.
Le cas Francis
S'il y a bien un personnage qui fait office de "ciment" durant les cinq premières saisons, c'est Francis. Finalement, ses voyages et son entrée dans le monde adulte constituent la seule véritable intrigue continue de la série jusqu'à ce que l'acteur se retire et ne fasse plus que quelques apparitions.
Constatez par vous-même : son passage de l'école militaire à l'Alaska ne passe pas inaperçu et s'étend sur deux épisodes à suivre, sa rencontre avec Piama introduit carrément un nouveau personnage récurrent jusqu'à la fin de la série, et son entrée au ranch marque une étape capitale du développement de l'aîné, lui conférant enfin un côté responsable et autonome.
Contrairement à la plupart des personnages de la série, aucune des mouvances du jeune homme ne seront passées inaperçues. Elles permettent, en un coup d'œil, de situer un épisode dans le temps, et font office – si l'on peut dire – de fil conducteur.
Comme tu as grandi !
Cela va de soi mais précisons-le quand même, le développement physique des acteurs marque un côté "continu" à la série. Contrairement à un dessin animé comme Les Simpson où la série semble figée dans le temps car les personnages ne grandissent jamais, Malcolm voit sa famille franchir plusieurs étapes : Dewey passe du petit garçon au pré-adolescent, Reese commence en terreur des cours de récréation pour terminer concierge les balayant, Malcolm découvre son statut de petit génie pré pubère aux prémices de la série et ouvre les portes de l'université à sa fin ! Mentionnons pour finir la grossesse de Lois - qui aura servi de fil conducteur à toute la quatrième saison – ainsi que la croissance de Jamie qui suit le même chemin que ses frères !
Tous ces changements font de cette sitcom pas comme les autres un divertissement évolutif d'une certaine manière, puisque peu de choses initialement établies se retrouvent intactes et similaires lorsque les dernières secondes du show s'affichent au compteur.
Du côté des plus vieux...
Papa et Maman ne changent pour ainsi dire pas beaucoup en sept ans, mais réalisent peu à peu leurs erreurs et leurs défauts. La Lois supra-autoritaire des premières saisons laisse place, progressivement, à quelqu'un de plus réfléchi, de moins "rentre-dedans". Ce n'est certes pas une vérité immuable – on la voit péter les plombs de temps en temps jusqu'à la fin – mais la matriarche aura su tirer une leçon de ses folies et nous le montre à plusieurs reprises.
Ainsi, elle s'excusera par exemple de la mère qu'elle a pu être dans l'épisode 6.14 – "La jambe de Grand-mère" (Ida Loses A Leg) ou prendra conscience du dangereux caractère qu'elle a et dont son fils Reese a hérité lors de l'épisode 7.16 – "La justicière" (Lois Strikes Back).
Quant à Hal, selon l'acteur qui l'incarne, seuls quelques changements capillaires ont pu être observés. Allez monsieur Cranston, avouez que le délirant Hal a su, pendant ces sept ans, évoluer à sa manière en multipliant ses délires et en donnant une dimension de plus en plus mythique à son personnage ! Le père de famille très effacé de l'épisode pilote s'est transformé peu à peu en l'un des personnages les plus charismatiques de la télévision américaine.
Une transition qui ne passe pas inaperçue !
Il serait dommage d'oublier la transition entre la saison 5 et la saison 6, qui marque à bien des égards un changement d'ère. Reese devient plus adulte en intégrant l'armée pour quelques temps (Il nous le confirmera dans l'épisode 6.08 – "Sévir et protéger" (Lois Battles Jamie), lorsqu'il entretient ses frères de la disparition de cette petite voix qui le poussait à faire des bêtises continuellement), Hal perd son travail suite à une énorme manipulation qui lui a presque valu un emprisonnement et Lois sombre dans une folie démente qui semble fortement justifiée après ces milles retournements de situation : avoir touché le fond et avoir eu la possibilité de remonter la pente avant de devoir creuser davantage explique sans doute son changement durant les deux dernières saisons, qui nous présentent comme dit plus haut une Lois de temps en temps plus posée.
La relation Craig/Lois
Cette idylle à sens unique, purement fantasmagorique, dure depuis le deuxième épisode de la première saison de Malcolm. Craig répond au schéma classique de l'homme obsédé par une femme mariée, semblant souffrir d'une sorte d'érotomanie masculine particulièrement prononcée (on pense par exemple au fait qu'il la traque partout ou qu'il sache tant de choses privées sur elle). Cette obsession n'est évidemment pas partagée par Lois, qui apprendra le béguin excessif de son collège dans l'épisode 2.07 – "Attaque à main armée" (Robbery). Impassible, cruelle, elle lui fera comprendre que rien n'est à espérer, même dans ses rêves les plus fous. Bien plus tard, dans le 7.20 – "Le tribunal des animaux" (Cattle Court), elle se permettra d'annoncer que si elle devenait vieille et sénile, réduite à l'état de légume et sans la présence de Hal pour veiller sur elle, une liaison de dernier recours serait envisageable. Aurait-il revu sa perception du bonhomme en six ans ? Toujours est-il que cette relation, à laquelle de très nombreux clins d'œil directs ou indirects sont faits pendant sept ans, reste l'un des fils conducteurs secondaires les plus marquants de la série. Il fallait oser !
Et aussi...
En vrac, nous pouvons aussi citer la mort de Victor et sa double vie, la grossesse, l'accouchement de Lois et l'entrée de Jamie dans la vie (élément que nous aurions pu citer dans la deuxième section, mais qu'importe), le parcours du commandant Spangler qui tira sa révérence correctement contrairement à certains passages qui auront disparu d'un moment à l'autre sans raison, ou encore les aventures d'Ida et de ses coutumes étranges.
Si Malcolm n'est pas une série à suivre d'épisode en épisode comme ce pourrait être le cas de 24 heures chrono par exemple, elle reste évolutive selon l'angle sous lequel on la regarde. Malgré quelques fautes de mauvais goût comme par exemple la disparition sans autre forme de procès de Gretchen et Otto (quelle honte, cette justification de pacotille !) ou la déchéance stupide du personnage de Kitty (l'actrice n'était plus disponible, certes, mais était-ce une raison pour faire n'importe quoi de la mère qu'elle incarnait ?), malgré quelques erreurs de cohérence que vous pourrez retrouver çà et là et qui sont inhérentes à une série télévisée de cette envergure, l'univers de Linwood Boomer reste vivant et bien vivant, avec une histoire qui aura connu un début et une fin, avec toutes les péripéties intermédiaires que cela implique...
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